Nous vivons dans une bulle
Elle est dans sa bulle... Il est dans son monde.
J'entends ces expressions souvent comme si c'était spécial... Mais nous le sommes tous, nous ne réalisons simplement pas à quel point.
Pour nous les postulats d'après lesquels nous vivons sont justes, mais notre voisin peut vivre avec une vision du monde très différente.
Mon père avait un cousin, Antoine, qui était père missionnaire en Malaisie. Je me souviens d'une de ses visites quand j'étais enfant, où il nous avait rapporté des pyjamas brodés. Mais ce n'est pas seulement pour cela que je m'en souviens. Il avait fait un rot bien sonore à la fin du repas, et s'était confondu en excuses. Puis, il nous avait expliqué comment à son arrivée en Malaisie, il lui avait fallu apprendre à roter à la fin du repas, parce que sinon il contrariait ses hôtes. Il avait maintenant le problème inverse, en France.
J'ai toujours trouvé cela fascinant, ces différences entre les cultures. Quand j'habitais en Angleterre on me surnommait parfois la grenouille, parce que pour les anglais il était impensable de manger des grenouilles et des escargots. Avec internet et la mondialisation les possibilités se multiplient et les esprits s'ouvrent maintenant à de nouvelles options, comme le fait de manger des insectes qui ne parait plus si étrange pour les européens.
Nous ne voyons pas non plus que la langue avec laquelle nous avons grandi impacte aussi notre vision du monde. Apprendre à parler le français par exemple, c'est apprendre en grammaire que le masculin l'emporte, ce qui n'est pas le cas dans d'autres langues. Comment cela nous conditionne-t-il ?
En français, pour décrire le sentiment d'amour nous avons un seul mot. Alors qu'en grec il en existe sept, et en arabe classique, quatorze. Comment cela impacte la vision de la vie, je suis curieuse?
Nous oublions aussi que les mots que nous utilisons ne sont que des symboles, de ce qu'ils représentent. Des symboles sur lesquels nous nous sommes mis d'accord. Et ces symboles ont aussi un impact sur nous.
A quoi pensez-vous lorsque vous entendez entrepreneur? Et quand vous entendez entrepreneuse? C'est pourtant le même mot, masculin/féminin.
La carte n'est pas le territoire... Le monde qui est dans notre tête n'est pas le monde, c'est une représentaion du monde. Cette représentation est colorée par notre éducation, notre culture, notre parcours de vie, toutes les croyances que nous avons glanées en chemin. Notre inconscient filtre les millions de stimuli disponibles pour nous offrir une vision du monde qui correspond à ce que nous croyons et attendons.
Avant de juger son frère, il faut avoir marché plusieurs lunes dans ses mocassins, disent les indiens Lakotas.
Oui, il est primordial de prendre du recul, en nous souvenant que nous vivons chacun dans une bulle. Au final, la notre n'est pas mieux que celle de notre voisin, elle est juste différente.
Christel
Photo de Paul Hanaoka
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